Algérie – Afrique : une fraternité historique et spirituelle au service de la paix

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(Par Cheikh Baba Diallo, Guide religieux, Responsable moral de la Fédération Liwahoul Hamdi International, Président fondateur du Mouvement Solution Bay Spirituality, ami de l’Algérie)

L’Algérie entretient avec l’Afrique des liens uniques, tissés à la fois par l’histoire politique et par une profonde communion spirituelle. Berceau de l’une des plus influentes confréries soufies du continent – la Tarikha Tidjaniya – et nation emblématique de la lutte anticoloniale, l’Algérie s’est imposée comme un symbole de liberté et de foi partagée. Des mouvements de libération nationale aux rassemblements spirituels soufis, du Sahara aux rives du Sénégal, l’Algérie a forgé une fraternité africaine fondée sur la solidarité, la religion et la quête commune de paix.
Un rôle déterminant dans la décolonisation
L’Algérie occupe une place particulière dans l’histoire de la décolonisation africaine. Son combat pour l’indépendance, mené de 1954 à 1962, a marqué profondément le continent africain et inspiré de nombreuses luttes pour la liberté. Après son indépendance, l’Algérie a soutenu activement les mouvements de libération à travers l’Afrique, devenant ainsi un pilier essentiel du panafricanisme et de la solidarité continentale. Alger a servi de plateforme diplomatique majeure en accueillant des négociations historiques et en apportant son soutien à divers pays africains en quête d’indépendance.
Aujourd’hui encore, l’Algérie demeure fidèle à ce principe fondamental du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, soutenant activement des causes telles que la Palestine et le Sahara Occidental. Cette constance dans ses positions a contribué à renforcer durablement les relations fraternelles avec de nombreux pays africains.
Des relations fraternelles avec les nations africaines musulmanes
La solidarité algérienne envers l’Afrique s’est également affirmée à travers une fraternité culturelle et religieuse profonde avec les nations africaines musulmanes. Forte de son identité arabo-berbère et islamique, l’Algérie indépendante a développé une coopération soutenue avec ses voisins sahéliens et ouest-africains, notamment par le biais d’échanges éducatifs, religieux et culturels. Elle a joué un rôle actif dans l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) et s’est impliquée dans diverses initiatives humanitaires et diplomatiques au bénéfice des populations musulmanes du continent.
L’exemple du Sénégal : une amitié scellée par la foi soufie
Parmi ces relations privilégiées, le lien entre l’Algérie et le Sénégal est particulièrement remarquable. Ces deux pays sont unis par l'histoire commune de l’islam soufi, en particulier à travers la confrérie Tidjaniya. Née en Algérie, la Tarikha Tidjaniya s’est propagée au Sénégal, devenant l'une des plus importantes confréries soufies du pays.
L’attachement algéro-sénégalais se traduit régulièrement par des actions de coopération et de solidarité concrètes. L’Algérie et le Sénégal partagent une vision commune au sein des institutions régionales et internationales, promouvant ensemble les valeurs de paix, de tolérance religieuse et de développement socio-économique. Sur le plan religieux, de nombreux échanges et rencontres spirituelles renforcent les liens entre les deux peuples.
L’Algérie, carrefour spirituel africain
Au-delà de la politique, l’Algérie brille en effet comme un phare spirituel pour l’Afrique, grâce à son patrimoine religieux exceptionnel. Le plus emblématique est sans conteste la Tarikha Tidjaniya, confrérie soufie fondée par Cheikh Ahmed Tidjane en plein Sahara algérien à la fin du XVIIIe siècle. Né en 1737 à Aïn Madhi dans le sud de l’Algérie, Ahmed Tidjane (surnommé Sidi Ahmed Tijani) est le fondateur de cette voie spirituelle africaine aujourd’hui suivie par des millions de fidèles. C’est dans son village natal d’Aïn Madhi qu’il a établi la confrérie Tidjaniya vers 1781, après avoir reçu – selon la tradition – l’inspiration prophétique de créer son propre ordre. Aïn Madhi, la terre qui a vu naître la Tidjaniya, est ainsi considérée comme un sanctuaire historique par les adeptes de cette confrérie à travers l’Afrique de l’Ouest.
Cette dimension spirituelle confère à l’Algérie un rôle particulier de carrefour religieux entre le nord et le sud du Sahara. Au XIXe siècle, la Tidjaniya s’est propagée depuis l’Algérie vers le Sénégal, le Mali, le Niger, le Nigeria et bien d’autres contrées, grâce à d’illustres disciples. Au Sénégal, des figures comme El Hadj Abdoulaye Niasse (père de Cheikh Ibrahim Niasse) et El Hadj Malick Sy ont enraciné la Tidjaniya dans la société, attirant des milliers de fidèles et faisant de la confrérie un pilier de l’islam sénégalais. Tous ces maîtres vénérés renvoyaient dans leurs prêches à la chaîne de transmission reliant inlassablement la terre sainte d’Aïn Madhi et la ville bénie de Tivaouane ou de Kaolack. De cette manière, l’Algérie s’est retrouvée au cœur d’une vaste toile spirituelle africaine, reliant des communautés au-delà des frontières et des ethnies, dans l’amour commun du dhikr (invocation de Dieu) et des enseignements Tidjani. Les pratiques spécifiques telles que le Lazim et le Waazifa, caractéristiques de la Tidjaniya, renforcent quotidiennement la foi en Dieu, apportent une paix intérieure aux pratiquants et constituent ainsi un rempart efficace contre la perdition des jeunes.
Sur le plan éducatif, il convient de souligner que tout musulman débute traditionnellement ses premiers cours religieux avec le livre Al-Akhdari, écrit il y a plusieurs siècles par le savant algérien Abd al-Rahman al-Akhdari, illustrant ainsi les racines profondes et anciennes de la tarikha en Algérie.
Consciente de cet héritage, l’Algérie d’aujourd’hui met en valeur son patrimoine soufi comme un pont culturel avec l’Afrique. Les zaouïas (écoles/couvents soufis) algériennes, dont certaines plus que bicentenaires, accueillent régulièrement des délégations africaines. De même, les autorités algériennes n’hésitent pas à célébrer la mémoire de Cheikh Ahmed Tidjane comme un trésor partagé avec les pays frères. Cet esprit d’ouverture spirituelle contribue à renforcer la fraternité avec des nations comme le Sénégal, où la Tidjaniya, tout en étant locale, garde les yeux tournés vers son berceau algérien.
Soufisme et valeurs de paix : l’Algérie en médiateur spirituel
Grâce à son héritage soufi, l’Algérie peut jouer un rôle déterminant dans l’éducation spirituelle et la consolidation de la paix en Afrique. Le soufisme, courant mystique de l’islam, porte des valeurs essentielles telles que la tolérance, la fraternité et le respect mutuel, offrant ainsi un antidote précieux contre l’extrémisme et les conflits.
Par diverses initiatives régionales et internationales, l’Algérie encourage l’intégration de ces valeurs spirituelles dans les stratégies de prévention des conflits et de lutte contre l’extrémisme violent. Elle met en avant la formation spirituelle comme moyen de promouvoir la paix sociale et l’unité.
Une fraternité algéro-sénégalaise illustrée par des actions concrètes
La relation privilégiée entre l’Algérie et le Sénégal est illustrée par plusieurs événements récents : l’Algérie a offert des billets pour le pèlerinage à La Mecque à des citoyens sénégalais et a convié des dignitaires religieux sénégalais à d’importantes cérémonies religieuses à Alger, renforçant ainsi les liens fraternels entre les deux pays. De plus, l’Ambassadeur d’Algérie à Dakar a été invité d’honneur à Kaolack, lors de cérémonies religieuses organisées par la Tidjaniya sénégalaise, soulignant l’importance des liens spirituels et diplomatiques entretenus entre les deux nations. 
Grâce à ces gestes et coopérations, l’axe Alger-Dakar s’affirme comme l’un des pivots d’une diplomatie spirituelle africaine. L’Algérie y gagne un surcroît de prestige et d’influence bienveillante en Afrique de l’Ouest, tandis que le Sénégal bénéficie du soutien d’un grand frère au Maghreb. Sur le terrain, cela se traduit par davantage d’échanges d’expertise (par exemple dans l’enseignement arabe et islamique), des jumelages entre villes ou institutions religieuses, et un front commun dans les forums internationaux pour défendre les valeurs de tolérance religieuse.
Sous la présidence actuelle de Son Excellence Abdelmadjid Tebboune, l'Algérie réaffirme son engagement à consolider ses relations fraternelles avec les pays africains et à promouvoir activement la paix et le développement du continent.
L’Algérie, par son héritage spirituel et historique unique, demeure un trait d’union essentiel entre les peuples africains. De la lutte pour la liberté au partage d’une spiritualité soufie inclusive, elle offre un modèle de solidarité et de fraternité capable de guider l’Afrique vers un avenir pacifique et prospère. En s’appuyant sur ses valeurs spirituelles, l’Algérie contribue activement à la construction d’un continent africain uni, tolérant et tourné vers un développement harmonieux et durable.

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