Le patron du groupe paramilitaire Wagner a accusé mardi des soldats de l'armée régulière russe d'avoir fui leurs positions à Bakhmout, épicentre des combats dans l'est de l'Ukraine, et accusé l'Etat d'être incapable de défendre la Russie.
L'homme d'affaires Evguéni Prigojine est en conflit ouvert avec la hiérarchie militaire russe qu'il accuse de ne pas fournir suffisamment de munitions à son groupe, en première ligne à Bakhmout, et multiplie les critiques depuis des jours.
"Aujourd'hui (mardi), l'une des unités du ministère de la Défense a fui de l'un de nos flancs (...) Ils ont quitté leurs positions, ils ont tous fui", a accusé M. Prigojine, dans une vidéo publiée sur Telegram.
"Nous avons un ministère de l'Intrigue au lieu d'un ministère de la Défense, donc notre armée détale (...) La 72e brigade a paumé trois kilomètres carrés" de territoire, a-t-il ajouté.
"Le poisson pourrit par la tête. Donc si les missions sont fixées par des trouducs, le soldat quitte la tranchée, parce que ça ne sert à rien de mourir inutilement (...) Un soldat ne devrait pas mourir à cause de la stupidité de ses chefs", a encore lâché M. Prigojine.
Ces déclarations intervenaient alors qu'au même moment, Vladimir Poutine supervisait un défilé militaire à Moscou commémorant le "Jour de la Victoire" sur l'Allemagne nazie en 1945, censé exalter la puissance de l'armée russe.
Sans les mentionner explicitement, le ministère russe de la Défense a semblé répondre aux accusations de M. Prigojine en assurant que ses troupes déployées à Bakhmout continuent de "soutenir" les opérations en "contenant les actions ennemies sur les flancs".
Cet étalage public d'accusations souligne en tout cas les profondes divisions au sein des forces russes, au moment même où celles de Kiev disent s'apprêter à lancer une grande offensive.
- Attaques croissantes -
S'il critique depuis des mois les commandants de l'armée russe, qu'il dépeint comme incapables, les attaques verbales de M. Prigojine sont récemment montées d'un cran.
Dans plusieurs vidéos publiées la semaine dernière, il a fait pleuvoir les insultes sur le ministre de la Défense Sergueï Choïgou et le chef d'état-major Valéri Guerassimov, les accusant d'être responsables pour les "dizaines de milliers" de combattants russes tués ou blessés en Ukraine.
Mardi, il a cette fois accusé la hiérarchie militaire de chercher à "tromper" Vladimir Poutine.
"Si tout est fait pour tromper le commandant en chef (Vladimir Poutine), alors soit le commandant en chef vous déchirera le c.., soit ce sera le peuple russe qui sera furieux si la guerre est perdue", a-t-il lancé dans son habituel langage fleuri.
"Il y a un crime qui s'appelle +la destruction du peuple russe+ (...) Et c'est ce que fait un petit groupe", a-t-il encore cinglé, pointant du doigt l'état-major. "Pourquoi l'Etat n'arrive-t-il pas à défendre le pays ?", a-t-il lancé.
La semaine dernière, le patron de Wagner avait annoncé qu'il retirerait ses hommes de Bakhmout le 10 mai si l'état-major ne lui fournissait pas les munitions qu'il réclame. Dimanche, il avait affirmé avoir reçu "la promesse" de livraisons suffisantes, semblant écarter toute retraite de Bakhmout dans l'immédiat.
Mardi, il a toutefois réitéré qu'il entamerait le repli en l'absence de livraisons suffisantes: il a affirmé que Wagner n'avait reçu mardi "que 10%" des munitions qu'il avait réclamées.
"Nous ne quitterons pas (Bakhmout), nous allons (rester) encore quelques jours, nous allons combattre malgré tout, nous nous débrouillerons", a-t-il dit, semblant repousser de quelques jours son ultimatum.
seneweb
- Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire