La communauté internationale s'est inquiétée, mardi, de la répression des manifestations en Colombie contre le gouvernement de droite, qui a fait une vingtaine de morts et des centaines de blessés. De nouvelles protestations sont attendues mercredi.
L'ONU, l'Union européenne, les États-Unis et des ONG ont appelé au calme, mardi 4 mai, en dénonçant la répression des manifestations en Colombie, qui ont fait une vingtaine de morts et des centaines de blessés. Le président, Ivan Duque, a fermement affirmé son soutien aux forces de l'ordre, alors que des postes de police ont été attaqués à Bogota et que des routes étaient bloquées par des manifestants.
"Rien de justifie qu'il y ait des personnes armées qui, sous couvert du désir légitime des citoyens de manifester, sortent tirer sur des personnes sans défense et agresser cruellement nos policiers", a affirmé le chef de l'État lors de son allocution télévisée quotidienne.
La mobilisation, initiée le 28 avril en réaction à un projet de réforme fiscale depuis retiré, s'est transformée en protestation générale contre le gouvernement de droite. Elle est marquée par des violences, notamment à Cali (sud-ouest), qui ont fait réagir la communauté internationale.
"Nous sommes profondément alarmés par les événements dans la ville de Cali en Colombie, où la police a ouvert le feu sur des manifestants qui s'opposent à une réforme fiscale, tuant et blessant un certain nombre de personnes", a déclaré Marta Hurtado, porte-parole du Haut-Commissariat aux droits humains de l'ONU, à Genève.
Des manifestants bloquaient à nouveau des routes, mardi, dans au moins quatre départements, ainsi qu'à Bogota et Cali, ville la plus affectée par les troubles. Marta Hurtado avait auparavant lancé un appel au calme, déplorant le fait que "les forces de sécurité ont tiré à balles réelles et battu des manifestants".
Escalade de violence
Le Défenseur du peuple, entité publique de protection des droits, avait fait état, lundi matin, de 19 morts, 89 disparus et le gouvernement de 846 blessés, dont 306 civils.
À Bruxelles, l'UE a jugé "prioritaire de mettre un terme à l'escalade de cette violence et d'éviter tout usage disproportionné de la force par les forces de sécurité". "Nous comptons sur les institutions colombiennes pour enquêter et traduire en justice les responsables de violations des droits humains et libertés", a déclaré Peter Stano, porte-parole du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
Les États-Unis ont appelé à la "plus grande retenue de la part de la force publique afin d'éviter d'autres pertes de vies". Et l'ONG Amnesty International a demandé à mettre "fin à la répression des manifestations" et à "la militarisation des villes".
La situation s'est aggravée à Cali dans la soirée de lundi. L'armée y est déployé depuis vendredi. Les blocages des principales voies d'accès commencent à générer une pénurie de carburants, et des préoccupations pour le passage de camions d'oxygène et de matériel médical, en pleine pandémie de Covid-19.
En annonçant le renfort sur place de plus de 700 soldats, 500 agents de l'Esmad (police anti-émeute) et 1 800 policiers, le ministre de la Défense, Diego Molano, avait argué que les troubles y étaient orchestrés par des groupes armés. Ivan Duque a renchéri en affirmant que les forces de l'ordre étaient la cible de ces groupes, qui entendent prendre le contrôle des anciens fiefs de l'ex-guérilla des Farc depuis qu'elle a signé la paix en 2016. Il a annoncé l'envoi de plusieurs ministres à Cali.
Appel à manifester mercredi
Le Défenseur du peuple, Carlos Camargo, a déploré qu'un membre de son service et quatre autres personnes, notamment du bureau colombien de l'ONU, aient été menacés la veille par la police, qui "a tiré plusieurs fois en l'air et vers le sol".
"Le déploiement de la force publique a été trop important, sans précédent, c'est terrifiant (...) Ils n'interviennent pas en négociant avec la communauté, mais en tirant contre les citoyens", a déclaré à l'AFP Yonny Rojas, représentant de Créalo, fondation de défense des droits humains à Cali.
Sous la pression des manifestations, le ministre des Finances a démissionné lundi. La veille, le président Duque avait retiré son projet de réforme, jugé agressif envers la classe moyenne et inopportun en pleine récession économique aggravée par la pandémie.
Ce conservateur, dont la popularité est en berne à 33 %, avait déjà été la cible de manifestations en 2019. Cette fois, il s'est engagé à présenter un nouveau texte, excluant les points les plus contestés, dont une hausse de la TVA et l'élargissement de la base d'imposition sur les revenus. Mais le Comité national de grève, à l'origine de la mobilisation, maintient son appel à manifester mercredi, à présent aussi contre un projet de réforme de la santé.
france24
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