Les secouristes sont toujours à la recherche de dizaines de personnes à Hpakant, en Birmanie, après un glissement de terrain dans une mine de jade. Jeudi matin, de nouveaux corps ont été repêchés dans un lac, sans guère d'espoir de retrouver des survivants.
Les sauveteurs commençaient à repêcher des corps, jeudi 23 décembre, dans un lac du nord de la Birmanie, où des dizaines de mineurs de jade sont portés disparus après un glissement de terrain mercredi, sans espoir de retrouver des survivants, selon l'un des sauveteurs. Après une victime retrouvée la veille, deux autres corps ont été repêchés dans la matinée de jeudi dans le lac en contrebas d'une colline qui s'est effondrée à Hpakant, près de la frontière chinoise, haut lieu d'extraction de jade, une industrie opaque, peu réglementée et dangereuse.
Les secouristes qui fouillent le lac et les décombres à la recherche de survivants ont d'abord déclaré qu'au moins 70 personnes étaient portées disparues, avant d'ajouter qu'ils essayaient toujours de confirmer ce chiffre.
"C'est la nature"
Après de fortes pluies dans la nuit et le brouillard qui ont ralenti les recherches, la météo est maintenant bonne sur le site et "nous recherchons sans relâche à l'aide de six unités de secouristes", a déclaré à l'AFP Ko Jack, de l'Organisation des secours birmans.
"Si les cadavres ne flottent pas aujourd'hui, ils apparaîtront les jours suivants, c'est la nature", a-t-il ajouté Ko Nyi, un autre sauveteur.
Selon un activiste local, des centaines de travailleurs sont retournés à Hpakant pendant la saison des pluies pour prospecter dans les mines à ciel ouvert, malgré l'interdiction imposée par la junte jusqu'en mars 2022.
Des dizaines de personnes meurent chaque année en travaillant dans le commerce lucratif et mal réglementé du jade, où des travailleurs mal payés extraient des pierres très convoitées en Chine.
Le jade et d'autres ressources naturelles abondantes dans le nord de la Birmanie, notamment le bois, l'or et l'ambre, ont contribué à financer les deux camps d'une guerre civile qui dure depuis des décennies entre les insurgés de l'ethnie Kachin et les militaires.
La moitié du PIB
Le commerce du jade génère plus de 30 milliards de dollars par an, près de la moitié du Produit intérieur brut de la Birmanie.
Une très faible partie de cette manne financière finit dans les caisses de l'État birman, la plupart du jade de qualité étant passé en contrebande en Chine où la demande pour cette pierre, censée symboliser la prospérité, semble insatiable.
Ce commerce draine en revanche des fortunes pour les militaires qui contrôlent l'accès à la région de Hpakant depuis le début des années 1990 et détiennent de nombreuses concessions minières.
Autre acteur incontournable: l'Armée de l'indépendance Kachin (KIA), une faction rebelle en lutte depuis des décennies avec les militaires pour le contrôle des mines et des revenus qu'elles génèrent.
Tout le monde perçoit des pots-de-vin et le jade finance de nombreux conflits entre militaires et groupes ethniques dans la région et même au-delà.
Le coup d'État de février a anéanti toute chance d'aboutir à une réforme du secteur entamée sous Aung San Suu Kyi, a jugé l'organisme de surveillance Global Witness dans un rapport paru en 2021.
"La catastrophe d'aujourd'hui est un rappel obsédant que les vies passent trop souvent après le profit dans les mines de jade de Hpakant", a déclaré à l'AFP Hanna Hindstrom, chargée de campagne Birmanie.
France24
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