Avantages personnels, développement de la collectivité territoriale ou simple question de prestige ?
Selon Le Soleil, les motifs qui font courir les responsables politiques et autres cadres des localités sont multiples.
D’après Moussa Diaw, enseignant en sciences politiques à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, tout dépend de la conception que ces leaders ont du pouvoir.
Pour certains, soutient-il, le poste de maire ou de président de conseil départemental confère une notoriété pour redorer son image et sa notoriété.
Au-delà, la fonction laisse espérer un meilleur positionnement politique au niveau national.
Ancien président de Délégation spéciale à Louga, l’expert en décentralisation Adama Guèye estime que la fonction permet de valoriser le statut d’un homme politique et d’en faire une sorte de tremplin pour d’autres ambitions.
«La visibilité donne des opportunités aux maires. Il s’agit d’un positionnement à l’intérieur des appareils politiques pour démontrer qu’on a une base solide», explique El Malicky Bousso du Forum civil.
Être à la tête d’une collectivité territoriale, estime cet ancien haut cadre qui préfère garder l’anonymat, permet d’avoir des raccourcis, notamment pour certains hommes d’affaires prêts à investir pour se faire élire.
À son avis, rares sont les citoyens qui se positionnent par idéal ou par profil.
Certains lient l’engouement que suscitent les fonctions de maire et de président de conseil départemental par les avantages matériels relatifs (lire article sur la rémunération d’un maire et les avantages inhérents à la fonction) qu’elles confèrent.
Le Pr Moussa Diaw en veut pour preuve «les dérives notées dans la gestion du foncier et le fait que certains se sont enrichis durant leur magistère».
Les fonds à gérer peuvent aussi augmenter les appétits. M. Bousso donne l’exemple des zones minières où les ristournes des chiffres d’affaires des sociétés permettent aux communes de se retrouver avec des montants consistants.
D’ailleurs, la presse se fait régulièrement les échos des résultats d’audits faits par les corps de contrôle de l’État qui épinglent souvent des responsables de collectivités territoriales.
Les budgets des collectivités territoriales, qui augmentent depuis quelques années, déclenchent des appétits, estime l’ancien haut cadre anonyme.
«Je regrette que des citoyens incapables de défendre un budget ou de présenter un plan à court, moyen ou long terme se bousculent à la tête des mairies», dit-il.
En droite ligne du transfert de compétences aux collectivités territoriales, l’État central a consenti des efforts financiers afin d’appuyer les collectivités locales qui sont ses démembrements.
Ainsi deux fonds ont été mis en place à cet effet, le Fonds de dotation de la décentralisation (Fdd) et le Fonds d’équipement des collectivités territoriales (Fecl).
Pour cette année, 27 milliards de FCfa et 33 milliards de FCfa ont été versés aux 599 collectivités territoriales du Sénégal au titre de ces deux fonds respectifs.
Le relèvement du Fdd, qui est passé de 16 milliards de FCfa en 2012 à 27 milliards en 2021, est salué par les associations des élus territoriaux à chacune de leurs rencontres.
Le Fecl a aussi connu une hausse significative, passant de 12,5 milliards de FCfa en 2012 à 33 milliards de FCfa en 2021.
L’engagement en faveur de sa localité peut être une source de motivation pour un candidat au poste de maire.
Des citoyens qui s’intéressent au développement de leur localité à travers différents mouvements associatifs reçoivent des demandes des populations locales à se présenter, explique Adama Guèye.
D’autres, ajoute-t-il, bien assis financièrement, veulent rendre la monnaie à leur localité.
«Ces leaders déclarés candidats ont dû analyser les rapports de force au niveau local et certains, connaissant bien les réalités, ont des projets et des relations de proximité avec les citoyens dans leurs localités respectives», explique Moussa Diaw.
C’est en évaluant l’ensemble de ces relations, de leurs capacités à proposer, à travers un projet, une autre façon de gouverner mais aussi une façon de s’impliquer, que certains leaders se sont lancés dans la conquête des mairies ou des conseils départementaux.
Parfois aussi les péripéties de la vie peuvent amener une personnalité engagée et adulée par les siens à finir dans le fauteuil de maire.
Maire sortant de Biscuiterie, Djibril Wade reconnaît avoir accédé à cette fonction par accident.
«J’ai largement œuvré dans le mouvement associatif pendant des décennies et parallèlement j’ai eu à soutenir mon oncle paternel, l’ancien président Abdoulaye Wade», a-t-il déclaré.
seneweb
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