Le ministre britannique de l’Immigration, Robert Jenrick, doit se rendre cette semaine en Tunisie, en Algérie et en Libye pour discuter du « défi mondial commun que représente la criminalité organisée liée à l’immigration ». Des pays qui font l’objet d’une « campagne de répression lancée par le gouvernement britannique contre des bandes de passeurs, dans le cadre de la lutte contre la crise de l’immigration »,
« Nous nous attaquons aux bandes de passeurs en amont afin d’empêcher les traversées et voyages dangereux et inutiles bien avant que les migrants ne soient à portée du Royaume-Uni », a expliqué le ministre.
Mais la lutte contre les passeurs n’est pas nouvelle pour les pays d’Afrique du Nord qui se trouvent en première ligne de la crise migratoire, en tête desquels la Tunisie qui, pour de nombreux Africains subsahariens, qui n’ont pas besoin de visa pour s’y rendre, fait office de tremplin vers l’Europe.
Le président tunisien, Kais Saied, a affirmé que les migrations irrégulières en provenance d’autres régions d’Afrique vers son pays, qui lutte contre l’instabilité économique, font partie d’une conspiration internationale visant à modifier le caractère démographique de la Tunisie.
Sa ligne dure à l’égard des Africains subsahariens entrant dans le pays a entraîné une augmentation du nombre de migrants tentant de quitter la Tunisie et de passer en Italie. Selon les données de l’ONU, au moins 12 000 migrants ayant atteint l’Italie jusqu’à présent en 2023 ont pris la mer depuis la Tunisie, contre 1 300 au cours de la même période en 2022.
Les statistiques du Forum tunisien des droits sociaux et économiques, révèlent que les garde-côtes tunisiens ont empêché plus de 14 000 réfugiés et migrants de partir en bateau au cours des trois premiers mois de cette année, contre 2 900 au cours de la même période l’année dernière.
Le mois dernier, le ministre des Affaires étrangères, Nabil Ammar, a rencontré son homologue italien, Antonio Tajani, pour discuter de ce problème croissant. Des accords de coopération ont déjà été conclus entre les deux pays, mais l’Italie s’est engagée à fournir une aide à l’investissement et à contribuer à l’obtention d’un prêt du Fonds monétaire international pour la Tunisie.
En retour, le ministre Ammar a déclaré que « la Tunisie est disposée à renforcer la coopération avec tous les partenaires pour lutter contre la traite des êtres humains et protéger les migrants. « Nous sommes prêts à faire tout ce qui est possible », a-t-il dit.
La piste algérienne
Les autorités algériennes ont démantelé un réseau international spécialisé dans le trafic d’êtres humains à travers l’Algérie vers l’Europe en mars de cette année, selon les médias locaux.
Elles ont découvert un réseau transportant des migrants syriens et libanais vers l’aéroport de Benghazi, en Libye. Ils étaient ensuite acheminés par la route jusqu’à la ville libyenne de Ghadamès, traversaient la frontière à travers le désert jusqu’à Debdeb en Algérie, puis jusqu’à la ville d’Oran pour être acheminés clandestinement par la mer vers l’Europe.
Le ministre algérien de la Justice, Abderrachid Tebbi, a annoncé en 2022 un plan gouvernemental visant à renforcer les sanctions contre les réseaux d’immigration clandestine et à offrir une assistance psychologique et sociale aux jeunes victimes de ces réseaux. Les forces armées et les autorités civiles patrouillent les frontières maritimes.
L’Algérie est considérée comme un pays de transit pour les migrants d’Afrique vers l’Europe. Au cours des deux dernières années, un nombre croissant de migrants ont fait la traversée en mer depuis les côtes algériennes vers l’Espagne, selon l’Indice de la criminalité organisée en Afrique,
Les réseaux de trafic d’êtres humains opèrent le long des frontières méridionales de l’Algérie, avec la plaque tournante du trafic de migrants de Tamanrasset, un important site de transit pour les migrants en route vers le Maroc et la Libye, avec des migrants traversant depuis le Mali et le Niger.
Selon l’ONG Caminando Fronteras, plus de 1 500 personnes sont mortes ou ont disparu entre 2018 et 2022 alors qu’elles tentaient de traverser sur des bateaux entre l’Algérie et l’Espagne.
La réponse armée de la Libye
Le ministère libyen de la Défense a annoncé la semaine dernière avoir mené des « frappes aériennes précises et ciblées » contre des repaires de contrebandiers dans la région côtière occidentale.
Les médias locaux ont indiqué que les sites se trouvaient à la périphérie de la ville côtière de Zawiya, théâtre d’affrontements entre des groupes armés impliqués dans le trafic d’êtres humains et la contrebande de carburant.
Ces frappes font suite aux pressions exercées par Abdel-Razzaq Al-Aradi, du Forum du dialogue politique libyen, pour que le gouvernement cesse de jouer le rôle de « chien de garde » de l’Europe en ce qui concerne les migrants. Il aurait déclaré que les retards dans le comptage et la régulation des migrants et des travailleurs africains en Libye pourraient mettre en danger la sécurité nationale ainsi que les moyens de subsistance, la santé et la sécurité des citoyens libyens.
La Libye a conclu avec l’Italie un protocole d’accord sur les migrations en vertu duquel elle bénéficie d’un soutien financier et technique pour intercepter les personnes qui tentent de traverser la Méditerranée.
L’UE fournit également une aide financière à la Libye dans ses « efforts pour démanteler les réseaux criminels organisés impliqués dans le trafic de migrants, la traite des êtres humains et le terrorisme ».
Les chiffres révèlent que la bataille pour le contrôle est loin d’être terminée. En 2022, 105 129 migrants ont atteint l’Italie, contre 67 477 en 2021 et 34 154 en 2020. L’agence des Nations unies pour les réfugiés a indiqué que 51 % des migrants qui ont traversé la mer vers l’Italie sont partis de Libye.
source: african manager
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