Depuis plusieurs mois, les hommes de Wagner ont pris pied au Mali. Comment leur présence s’est-elle décidée ? Combien sont-ils et où sont-ils déployés ? Comment se financent-ils ? Jeune Afrique lève le voile sur le théâtre d’ombres de Moscou à Bamako.
Chacun a veillé à apporter ses dossiers. Emmanuel Macron, costume noir et cravate assortie, a disposé sous sa main gauche une chemise de la même couleur. Le président français a pris soin de préparer de quoi prendre quelques notes. L’ancien ministre de l’Économie a été à bonne école : plusieurs de ses aînés au gouvernement lui ont naguère appris qu’un bon politicien ne se déplaçait jamais sans quelques papiers sous le bras. Question de crédibilité. À quelques mètres de là, de l’autre côté d’une table longue de cinq mètres, Vladimir Poutine l’observe. Habillé d’un bleu marin qui tranche sur les teintes crème du salon des représentations du Kremlin, les coudes écartés, le chef de l’État russe a planté ses talons dans le sol. La posture évoque la nonchalance, l’assurance et l’expérience.
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Durant cinq heures, ce 7 février, les deux adversaires évoquent la sécurité en Europe de l’Est et la crise qui touche l’Ukraine, menacée d’invasion par la Russie. Mais le Mali est aussi au menu des discussions. Depuis plusieurs mois, Paris dénonce l’implication croissante du groupe Wagner à Bamako, tandis que Moscou se borne à nier tout lien avec ces mercenaires. Emmanuel Macron n’est pas dupe. Il a à sa disposition les informations de ses services de renseignement prouvant la connexion entre le groupe et Evgueni Prigojine, un familier de celui qui se trouve aujourd’hui face à lui, de l’autre côté de l’immense table.
Le président français le sait, cette arrivée des mercenaires au Mali qui a précipité le retrait de Barkhane s’est faite avec l’aval du Kremlin. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’Emmanuel Macron dénonce cette relation. Il l’a fait voici quelques mois au sujet d’un autre pays africain, la Centrafrique, et son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, l’a lui aussi répété.
Il en faut plus pour déstabiliser Vladimir Poutine. Ce dernier se sait découvert mais protégé. Le groupe Wagner n’a aucune existence légale en Russie, où les sociétés militaires privées sont interdites. Et personne n’a jamais pu mettre la main sur un ordre direct du Kremlin aux mercenaires. Alors le président russe nie. Ce 7 février, la partie de poker menteur continue.
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