Pour l’entourage du président Mohamed Bazoum, les rivalités autour du partage de la future rente issue de l’or noir constitueraient un des leviers essentiels du putsch du 26 juillet.
C’est un conseil des ministres bien particulier qui aurait dû se tenir le 27 juillet dernier à Niamey. Juste avant qu’une junte ne vienne bouleverser le cours de l’histoire en renversant le président nigérien Mohamed Bazoum. Coincidence ou pas, ce jour-là, le gouvernement de ce pays sahélien aurait dû approuver un décret stratégique, qui aurait pu permettre la création d’une nouvelle société, PetroNiger, dont l’objectif aurait été de gérer les ressources pétrolières du pays.
Ce projet a-t-il contribué à précipiter la chute du régime ? A-t-il été perçu par les putschistes comme le geste ultime d’une reprise en main d’un secteur juteux qui aurait pu les léser, eux ou leurs commanditaires ? Dans l’entourage de Mohamed Bazoum, en tous les cas, ce scénario ne fait guère de doute. « Le pétrole n’est pas le seul motif du putsch, mais il est un des leviers essentiels », estime un proche conseiller du président, en pointant très clairement les responsabilités du camp de l’ancien président Mahamadou Issoufou (2011-2021).
Bien qu’il s’en défende, ce dernier est aujourd’hui suspecté d’avoir joué un rôle dans le coup de force du général Abdourahamane Tiani. C’est lui qui avait nommé l’actuel homme fort de la junte à la tête de la garde présidentielle. Après l’élection de Mohamed Bazoum, avec lequel il a cheminé politiquement pendant trente ans, c’est son fils Sani Mahamadou Issoufou, dit Abba, qui avait été promu ministre du pétrole, des mines et des énergies renouvelables, avant de se voir dessaisir au début 2022 du portefeuille des énergies renouvelables. Une certaine continuité.
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Pendant ses deux mandats à la tête du Niger, Mahamadou Issoufou avait notamment la mainmise sur la Sonidep, la société nigérienne de pétrole. « C’est un secret de polichinelle, la Sonidep a toujours été la caisse noire de tous les partis politiques, pas seulement du PNDS [le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme, fondé en 1990 par Mahamadou Issoufou] », raconte un membre de la société civile qui a enquêté sur ces dossiers. En témoignent les fraudes massives et des détournements dénoncées à plusieurs reprises par la haute autorité de lutte contre la corruption. Alors que l’endettement de la société atteindrait aujourd’hui plus de 200 millions de dollars.
Ce manque de gouvernance interpelle d’autant plus que le Niger s’apprêtait au moment du putsch à changer de dimension économique, grâce à l’exportation de son or noir. Jusqu’à présent, la production pétrolière du pays était restée modeste, de l’ordre de 20 000 barils par jour, dont la moitié suffisait néanmoins depuis 2011 à la consommation domestique quand le reste était exporté vers des pays voisins dont le Nigéria. De nouvelles découvertes, en 2013 ont cependant fait miroiter un avenir différent.
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