Du 30 octobre 1848, jour de l’élection du métis Saint-louisien Barthélémy Durant Valentin- BDV (5 décembre 1806-30 juillet 1864) comme Délégué du Sénégal à Paris…, au 23 janvier 2022, jour des élections locales, qui viennent de prendre fin, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts des observateurs, avertis ou non-initiés. Dans notre cher pays, des gens tentent d’oublier, que plusieurs consultations électorales y se sont déroulées, avec ces pluies de passions, moissonnant des graines de rêves et des épines de désillusions.
En effet, le Sénégal affiche au compteur 174 ans de vie politique compte non tenu, des autres formes de démocratie, qui existaient jadis dans nos royaumes bien précoloniaux et qui attestent, si besoin en est, d’une tradition ancrée de la démocratie du vote.
Dans la rédaction de cet article, je n’ai pas cru devoir me dispenser d’un rappel si important de notre trajectoire, ô combien historique ?
Sans coffre, ni culture…
C’est parce que, sur le terrain, j’ai constaté des acteurs politiques, sans coffre intellectuel, ni épaisseur d’une vraie culture politique, durant la campagne et le jour du vote, montrer un visage balafré de notre démocratie, en entonnant l’hymne de la violence illégitime, de l’intimidation manipulatrice sans raison ; histoire d’instaurer la stratégie du chao hors sol. Mais les résultats surprenants pour certains, sortis des urnes, n’ont rien pu peser sur la balance des invectives sataniques.
En effet, à la lecture des résultats provisoires nés des élections locales du 23 janvier 2022, on peut dire sans conteste, que la grande coalition « Benno Bokk Yakaar »* (Unis par l’espoir) est en pleine zone grise, où la carte de la suprématie électorale va forcément être rabattue. Le passé composé sera à nouveau recomposé.
A titre illustratif, « Yewi Askan wi »* (Libérer le peuple), dans la très convoitée et hautement symbolique de la Ville de Dakar a obtenu 173.628 voix contre 81.015 voix pour « Bby », l’entité qui regroupe les politiques du pouvoir. Autrement dit, « Yewi » contrôle 12 communes contre 4 dans l’escarcelle de « Benno ».
Déjà, dans l’entourage du président de la coalition présidentielle, des fissures ont été notées bien avant les élections locales, occasionnées par des guerres de positionnement et aggravées, hélas par des investitures vigoureusement rouspétées.
L’Ouragan des 6 jours
Cornaquée par l’ouragan des 6 jours de mars 2021 né de l’affaire de « Sweet Beauty », la coalition « Yewi » a mis à profit ces évènements et infliger à « Benno », une perte de la bataille des opinions favorables. Il fallait juste attendre un cadre d’expression électorale pour faire la formalité et montrer au pouvoir d’en face, qu’il devait revoir sa copie. L’ère de la sinistrose est-elle ouverte pour certains ?
Au lendemain de ces évènements, au lieu de décrypter le message de contestation populaire, envoyé par des jeunes en furie, sur faisceaux trop destructeurs, certains leaders de « Bby » ont jugé déplacer le curseur, jusqu’à l’intérieur du pays, par meetings successifs à coût de millions en tentant de montrer des forces politiques nettement inexistantes.
D’ailleurs, dans ce Sénégal des profondeurs, la grande coalition « Bby » a conservé son bastion comme dans des collectivités locales du Nord, de même qu’à Kédougou et dans le « Njaambur » du Louga, gagne et perd dans le bassin arachidier, se voit son électorat s’effriter gravement dans le Sine, échoue dans les communes de Thiès et se fait laminer gravement dans le Sud…
Le vote au profit de « Yewi » est un signe de protestation contre le pouvoir de « Bby ». Et les voix de celui-ci peuvent-être analysées comme un plébiscite, même si la contre-performance de certains leaders a surpris plus d’un !
Je ne pense pas que ceux qui ont voté ce dimanche 23 janvier 2022 étaient tous acteurs de l’ouragan des 6 jours de mars 2021 ou vice versa. A l’analyse, il me semble important d’intégrer, cette classe sociale délaissée par l’élite politique ou qui se sent indifférente et qui, pour se soustraire, va recourir au vote, pour tenter de changer sa quotidienneté.
Tentative d’enclavement de la démocratie
Dans l’optique des législatives de juin 2022 et de la présidentielle très attendue de 2024, les deux principales forces politiques les plus en vue du Sénégal, en ce moment doivent rester vigilants.
Si l’une doit sortir de son brouillard pour lire les bonnes températures de la météo sans lunette, l’autre, doit savoir que le plus difficile reste à venir, pour le bien et le maintien de sa dynamique politico-électorale.
Sans occulter la coalition « Wallu Senegaal » (Sauver le Sénégal) autour de l’ancien président Me Abdoulaye Wade, lancée le vendredi 8 octobre 2021, qui, de jour en jour, accuse du retard, et qui lui sera très difficile de rattraper. N’est-ce pas du temps perdu ?
En terme clair, je l’indique ici en gros : on ne pourra jamais enclaver la démocratie même si, à chaque élection, certains tentent le contraire, oubliant qu’elle est dynamique ; elle ne meurt pas non plus ; mais c’est plutôt les régimes moribonds, qui s’effondrent-du fait de leur impopularité-dans les décombres, d’un sinistre oubli.
Par Serigne Mansour Sy CISSE, journaliste-écrivain, Dakar
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