Une ordonnance du Tribunal administratif du logement, dont Radio-Canada a obtenu copie, explique la raison de la visite d’un huissier à la résidence d’une diplomate sénégalaise le 2 août. Cette visite a dégénéré et des policiers se sont rendus sur les lieux. Il s’en est suivi une intervention musclée, qui s’est transformée en incident diplomatique.
C’est après cette décision qu’un huissier s’est rendu chez la dame qui a été arrêtée, puis relâchée par le Service de police de la Ville de Gatineau (SPVG). Elle devait plus de 45 000 $ en dommage à son locateur, selon les documents judiciaires.
La décision a été rendue le 2 juin, mais la dame était absente lors de l’audience.
Dans le document, on y apprend que "le locateur demande le recouvrement du loyer non payé au moment du départ du locataire, des dommages-intérêts pour dommages au logement, plus les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue au Code civil du Québec et les frais".
La diplomate aurait occupé un bungalow à Gatineau pendant deux ans, soit de novembre 2018 à octobre 2020, et aurait laissé derrière elle des dégâts et dommages considérables.
De la moisissure sur les murs, des planchers imbibés et des infestations de coquerelles en font partie.
Des meubles auraient été endommagés et certains sont manquants, toujours selon le document rendu par la cour.
Le fil des événements, selon le gouvernement sénégalais
La République du Sénégal a affirmé, vendredi, qu'une de ses diplomates en service à Ottawa aurait été battue à son domicile par la police le 2 août.
L’ambassade du Sénégal avait publié un communiqué de presse du ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l'extérieur sur sa page Facebook au sujet de l'incident.
"Au cours de cette opération, la police canadienne a exercé sur la diplomate une violence physique et morale humiliante devant témoins et en présence de ses enfants mineurs", selon le communiqué.
"Malgré le rappel du statut de diplomate de la victime et de l'inviolabilité de son domicile, les éléments de la police canadienne l'ont menottée et sauvagement tabassée, au point qu'elle a eu du mal à respirer, ce qui a conduit à une évacuation par ambulance à l'hôpital", peut-on lire dans la version officielle du gouvernement sénégalais.
Une personne violente envers des policiers, soutient le SPVG
De son côté, le SPVG soutient plutôt que ses membres ont maîtrisé et arrêté une personne qui s'était montrée violente envers les agents.
La police raconte, par voie de communiqué, que ses agents ont été appelés en renfort pour aider l’huissier à exécuter son ordonnance.
Le corps policier maintient avoir fait face "à une personne agressive [qui refusait] de collaborer" et que "les policiers sont intervenus afin d'expliquer la démarche et de s'assurer que tout se déroule dans le calme".
Une policière aurait reçu un coup de poing au visage pendant l’intervention, ce qui a incité ses collègues à arrêter cette personne "pour la sécurité des personnes présentes".
"La personne a résisté à son arrestation et blessé par morsure un deuxième policier. La personne a alors été amenée au sol pour être maîtrisée", a expliqué la police. "La personne a été détenue à l'arrière du véhicule de patrouille, sous supervision d'une policière, le temps que l’huissier exécute son ordonnance et que la situation soit revenue au calme. En aucun temps la personne n'a mentionné avoir été blessée ou avoir des douleurs lorsque questionnée."
Les ambulanciers auraient ensuite appelé le SPVG
en assistance plus tard dans la journée, peu après 15 h, pour intervenir auprès de cette personne.
Le statut diplomatique en cause
Le gouvernement sénégalais a qualifié l'incident de violation "flagrante" de la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques.
Il dit aussi avoir demandé qu’une enquête soit ouverte et que "des poursuites soient menées contre les auteurs de cette agression inadmissible, qui constitue une atteinte grave à l'intégrité physique de la personne et à la dignité humaine".
Affaires mondiales Canada assure prendre "très au sérieux" ses obligations quant aux relations diplomatiques.
"Nous sommes extrêmement préoccupés par le traitement allégué d'une diplomate sénégalaise par le Service de police de la Ville de Gatineau (SPVG). Ce qui s’est passé est tout simplement inacceptable", a déclaré le ministère samedi.
En raison de l’immunité diplomatique, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a fermé le dossier concernant la plainte des policiers, a indiqué le ministère de la Sécurité publique du Québec.
Le ministère a aussi confirmé que le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) a été mandaté pour enquêter sur les événements.
L’ambassade sénégalaise a refusé les demandes d’entrevue de Radio-Canada.
seneweb
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