Affaire Bygmalion:
Le procès de Nicolas Sarkozy pour les dépenses excessives de sa campagne présidentielle de 2012 doit démarrer mercredi, mais il pourrait être interrompu, car l'avocat de Jérôme Lavrilleux, l'ex-directeur adjoint de la campagne, est atteint du Covid-19.
De retour au tribunal, cette fois pour le dossier Bygmalion : deux semaines après sa condamnation dans l'affaire dite "des écoutes", l'ancien président Nicolas Sarkozy est jugé à partir de mercredi 17 mars pour les dépenses excessives de sa campagne présidentielle de 2012.
Le procès, qui s'ouvrira à 13h30, pourrait cependant être très vite interrompu : Jérôme Lavrilleux, à l'époque directeur adjoint de la campagne, a fait une demande de renvoi, car son avocat est atteint du Covid-19 et hospitalisé. Les avocats des quatorze prévenus au total – anciens cadres de Bygmalion et de l'UMP, experts-comptables – se sont associés à cette demande et le parquet ne devrait pas s'y opposer. Le procès, audiencé sur un mois, pourrait débuter véritablement au mois de mai.
Le 1er mars, Nicolas Sarkozy est devenu le premier ex-président de la Ve République à être condamné à trois ans d'emprisonnement, dont un ferme, pour corruption et trafic d'influence.
Il encourt un an d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende pour "financement illégal de campagne électorale" dans le dossier Bygmalion, une affaire qui avait entraîné des déflagrations en chaîne à droite au fur et à mesure des révélations. Même s'il "ne se dérobera pas", Nicolas Sarkozy a fait savoir qu'il n'assisterait qu'aux audiences le concernant.
Contrairement à ses coprévenus renvoyés notamment pour escroquerie ou complicité, il n'est pas mis en cause pour le système de fausses factures, imaginé pour masquer les dépenses excessives de sa campagne, qu'avait révélé Jérôme Lavrilleux dans une surprenante confession télévisée en 2014.
Mais selon l'accusation, Nicolas Sarkozy a laissé filé les dépenses malgré plusieurs alertes claires sur les risques de dépassement de plafond et il a "incontestablement" bénéficié de la fraude qui lui a permis de disposer de "moyens bien supérieurs" à ce qu'autorisait la loi : au moins 42,8 millions au total, soit près du double du plafond légal à l'époque (22,5 millions d'euros).
"Campagne éclair"
L'enquête décrit une campagne qui se voulait d'abord "éclair" pour le président sortant – seulement une quinzaine de meetings prévus, dont trois ou quatre grands rassemblements. Mais la machine s'emballe : "moyens techniques les plus en pointe" pour la scène, le son et l'éclairage, "mise en scène grandiose et millimétrée" pour les grands meetings... Les prix n'en finissent plus de grimper.
Et alors que les premières alertes de risques de dépassement tombent, le candidat demande au contraire qu'on accélère le rythme. Il y aura au total plus de 40 meetings. Une campagne "d'une rare densité", marquée par une succession "très rapide" des meetings et une "totale improvisation" des donneurs d'ordre, dit aussi l'accusation.
Pour éviter au candidat de devoir reconnaître publiquement que ses dépenses avaient dérivé "de manière spectaculaire", "avec les conséquences politiques et financières" qui s'en seraient suivies, il a été décidé de "purger" le compte de campagne, soutient l'accusation. Grâce à un système de double facturation, le prix des meetings est drastiquement réduit et le reste est facturé à l'UMP, au nom de conventions fictives du parti.
Guerre fratricide
Le procès risque de rallumer une guerre fratricide au sein de la droite française, le camp sarkozyste et les proches de Jean-François Copé se rejetant mutuellement la responsabilité de la fraude.
Jérôme Lavrilleux (à l'époque également directeur de cabinet du patron de l'UMP Jean-François Copé) est le seul au parti – devenu Les Républicains – à avoir reconnu les faits. Il avait d'abord été accusé d'avoir constitué un "trésor de guerre" au profit de l'avenir politique de son patron.
Jamais mis en cause, Jean-François Copé sera entendu au procès comme simple témoin.
Renvoyé pour escroquerie, le directeur de la campagne, Guillaume Lambert, assure lui que le système a été mis en place à son insu. Pour lui, "rien" dans le dossier ne montrerait d'ailleurs un lien avec la campagne – il privilégie la thèse de l'enrichissement personnel de dirigeants de Bygmalion.
"Je continue à me demander où est passé l'argent", avait aussi de son côté dit Nicolas Sarkozy devant les enquêteurs, estimant que le prix moyen de ses meetings était "en ligne" avec ceux de son opposant François Hollande.
France24
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