Si beaucoup de Tunisiens protestent contre les propos anti-migrants de leur président et affichent leur solidarité avec les Subsahariens, d’autres tiennent un discours ouvertement raciste et multiplient les actes d’hostilité.
La « tolérance zéro » annoncée par le président Kaïs Saïed à l’égard des migrants subsahariens en situation irrégulière n’a pas tardé à se concrétiser, parfois de façon violente. Employeurs ou propriétaires, tout d’abord, ont compris qu’ils étaient passibles de poursuites et d’amendes s’ils hébergeaient ou donnaient du travail à un étranger non déclaré à la police, a fortiori à un clandestin.
La réaction a été immédiate : les bailleurs, souvent de petits marchands de sommeil profitant de la situation des migrants, ont aussitôt expulsé leurs locataires, et les employeurs se sont résolus à se séparer d’une main-d’œuvre qui leur était d’une aide précieuse.
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« Va trouver un Tunisien qui fasse la plonge ou donne un coup de main en cuisine sans renâcler », se lamente un gérant dans la restauration rapide, qui confie qu’il aurait pu ne pas renvoyer les deux Ivoiriens qui travaillaient en cuisine en pariant que les contrôles policiers ne seraient pas systématiques, mais a préféré la prudence car « nul n’est à l’abri d’une délation ».
« Des lois protectionnistes d’un autre temps »
Certains expriment leur solidarité, jouent même la bravade en publiant sur les réseaux sociaux des offres d’hébergement ou d’emploi destinées aux migrants en difficulté. « Ce sont des lois protectionnistes d’un autre temps, témoigne l’un d’eux. Les Tunisiens, en tant que migrants, ont aussi fait l’expérience de l’ostracisme. Il est temps d’évoluer et d’être conséquents avec notre volonté affichée de devenir un hub africain. »
Mariame, une femme de ménage venue de Conakry, est loin de ces considérations. Elle cherche un toit et surtout un moyen de quitter la Tunisie tant elle a peur. Elle louait avec trois de ses compatriotes, dans la périphérie de l’Ariana, un deux pièces que trois individus ont vandalisé après avoir dérobé un peu d’argent et des babioles sans valeur. Elle a reconnu des jeunes du quartier, des petits voyous qui trainent au café et l’interpellent régulièrement en l’appelant « Blanche neige ». Des chômeurs en quête de revenus faciles ou de menus larcins, et qui font preuve de violence « surtout envers des femmes ». Mariame n’a pas porté plainte de crainte d’envenimer une situation déjà tendue. Elle considère que ces jeunes sont dangereux car imprévisibles : « Ils agissent seuls sous l’effet de ce que dit leur entourage ou peut-être même de la drogue. »
source: jeune afrique
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