la baisse de niveau des enseignants est devenue un phénomène récurrent dans le système éducatif. Si pour certains, point n’est besoin d’être un expert pour reconnaître cette situation, pour d’autres il faut tout de même la relativiser dans ce contexte marqué par la hausse du minimum requis en termes de diplômes pour aspirer à devenir enseignant. Le quotidien national Le Soleil a enquêté.
Si la baisse du niveau des élèves ne fait plus de doute, les raisons de cette situation, elles, font encore l’objet d’un débat au sein de l’opinion. Alors que certains y voient les effets de la massification des effectifs, d’autres pointent du doigt plutôt le système de formation des enseignants. Formation insuffisante, manque de motivation, etc., sont autant de causes qui seraient à l’origine de la plupart des problèmes que rencontrent les élèves.
Trouvé dans son bureau entouré de documents à l’école Khalifa Mansour de Dalifort, le diplôme d’Honneur accroché sur un tableau, Maguèye Faye, Directeur de cet établissement d’enseignement privé, n’y va pas avec le dos de la cuillère. Il est formel sur la question. Le niveau des enseignants, a-t-il reconnu, a fortement baissé depuis des lustres.
Cet enseignant de formation est nostalgique même du passé quand il parle de formation des enseignants. Il est établi que l’enseignement est un métier à apprendre, rappelle M. Faye. Il revient sur ce qui se faisait dans le passé en termes d’encadrement dans le système éducatif.
Le Sénégal, dit-il, a connu une longue évolution de ses systèmes de formation aussi bien en matière de structures que d’approches. On peut citer les écoles normales, les centres de formation pédagogiques avant la mise en place des écoles de formation des instituteurs (Efi) remplacées aujourd’hui, par les Centres régionaux de formation des personnels de l’éducation et de la formation (Crfpe).
Le curriculum de base, une équation
Si pour la plupart des personnes-ressources interrogées c’est la massification à outrance notée dans le recrutement des enseignants pour réduire de manière considérable le déficit dans le système qui est à l’origine de la baisse de niveau noté chez les enseignants, d’autres indexent, pour le déplorer, l’instauration durant les années 2000 du curriculum de base comme principal outil de formation dans le secteur.
« Le niveau a complétement baissé et pour moi, cela est dû à l’instauration de ce qui est appelé le curriculum de base », indique Maguèye Faye. Il cite aussi l’arrivée des volontaires de l’éducation dans le système. Parmi ceux-ci, dit-il, on retrouve des gens qui n’avaient pas le diplôme requis pour prétendre à ce métier.
« Des enseignants ont intégré le système alors qu’ils n’ont pas fait de formation », rappelle M. Faye. Mais, à en croire le Directeur d’école, c’est surtout le problème du curriculum de base qui est à l’origine de cette baisse de niveau des enseignants. Aujourd’hui, dit-il, il y a un grand fossé entre la formation classique qui se faisait dans des établissements d’alors comme les écoles normales régionales et ce qui se passe actuellement dans les établissements de formation d’enseignants.
« À l’époque, le candidat faisait bac+4 et bénéficiait d’une formation pointue. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, où souvent on ne fait que six mois ou tout au plus une à deux années pour intégrer les classes », note M. Faye. Et de rappeler que la plupart des sortants des anciennes écoles sont devenus, aujourd’hui, des Directeurs d’écoles ou des inspecteurs de classe exceptionnelle.
En dehors de l’Ecole normale, il y avait aussi le Centre de formation pédagogique et spécial. Il était logé à Thiès et ne recrutait que des bacheliers, se souvient l’ancien instituteur. « Il fallait avoir le Bac et faire cette école pour une année de formation. En plus de ça, quand les écoles normales régionales ont disparu, il y avait les écoles de formation d’instituteurs (Efi). C’était aussi une formation très sérieuse, indique M. Faye. Dans les Efi, il fallait avoir aussi le Brevet de fin d’études moyennes (Bfem) ou le Bac et faire une formation de deux ou trois ans avant d’exercer le métier, se rappelle avec nostalgie le Directeur de Khalifa Mansour.
Aussitôt après la disparition de ces structures de formation décentralisées même au niveau régional, apparaît le corps des volontaires de l’éducation. « Une cassure », note l’enseignant. Les candidats ne subissaient qu’une formation d’un ou deux mois seulement. « C’est un problème », a dit M. Faye. Il attire aussi l’attention sur le fait que « être aujourd’hui bachelier, cela ne veut pas dire avoir un bon niveau et ce sont ces gens qui se retrouvent comme enseignants dans les classes ».
Il s’étonne du fait que des formations durent juste un ou deux mois ou tout au plus 6 mois. « Avec ça comment peut-on avoir un bon niveau ? » s’interroge M. Faye. Il y a eu plusieurs paramètres qui ont conduit à cette situation, estime-t-il. M. Faye de citer, entre autres, le chômage des jeunes et la quête de l’emploi à tout prix.
SENEWEB
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