Pierre Grosser est professeur agrégé en sciences politiques et enseignant à Science Po Paris. Spécialiste des questions de conflits armés et de relations internationales, il revient sur l’opération d’évacuation de civils à l’aéroport de Kaboul, encadrée par l’armée des Etats-Unis après la prise de la capitale afghane par les talibans le 15 août, et les comparaisons parfois établies avec des précédents comme la chute de Saïgon, au Vietnam, le 30 avril 1975.
Le président Joe Biden juge que l’opération d’évacuation en Afghanistan, encadrée par l’armée américaine, qui doit prendre fin mardi 31 août, est l’une des « plus difficiles de l’histoire ». En tant qu’historien des relations internationales, quel regard portez-vous sur cette déclaration ?
Il s’agit effectivement d’une opération particulièrement difficile, puisqu’elle se déroule réellement en temps de guerre, contrairement à l’évacuation de civils à Saïgon en avril 1975. Officiellement, les Américains avaient alors mis fin à leur conflit avec les Vietnamiens par les accords de janvier 1973. Ils savaient qu’une importante armée [l’armée populaire vietnamienne] arrivait sur la capitale du Sud-Vietnam. Cette évacuation était presque plus prévisible encore que celle de Kaboul. Les Etats-Unis n’ont pas connu énormément de défaites ayant provoqué des évacuations d’urgence de ce type.
Leur armée a tout de même rencontré quelques traumatismes, par exemple pendant l’hiver 1941-1942, quand elle a évacué les Philippines face à la campagne japonaise. On pense également aux évacuations de civils [fuyant le régime communiste] en hiver 1950-1951 en Corée, d’où l’armée américaine fut éjectée par les troupes chinoises, donnant lieu au plus grand repli de l’histoire militaire des Etats-Unis.
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